SANTōKA
Santōka est le nom de plume de Taneda Shōichi (1882-1940), moine itinérant et poète de haïku japonais, connu pour ses haïkus en vers libres. Il a publié sept recueils de poèmes, des journaux intimes et de nombreuses éditions la revue Sambaku qu’il a fondée en 1926.
Né dans un village situé à l’extrémité sud-ouest de Honshū, l’île principale du Japon, dans une riche famille de propriétaires terriens, il est élevé par sa grand-mère après le suicide de sa mère, alors qu’il a 11 ans. Dans ses journaux intimes, il attribuera cette tragédie aux débauches de son père, et il y verra l’origine d’une série de catastrophes : l’abandon de ses études de littérature à l’Université, l’échec de son mariage obligé, le suicide de son frère cadet rongé par les dettes, la mort de sa grand-mère, sa difficulté à trouver un travail à Tokyo, la mort de son père... Tout cela vécu dans un état quasi permanent de « dépression nerveuse » (un euphémisme pour des ivresses répétées et sévères) qui l’amènera à plusieurs reprises à tenter de se suicider.
En 1911, après quelques travaux de traduction (Tourgueniev, Maupassant), il s’engage dans le mouvement littéraire shinkeikō (litt. « nouvelle tendance ») qui prône le « haïku de forme libre », c’est-à-dire un style qui renonce à la fois à la règle syllabique traditionnelle (5-7-5) et au kigo, le « mot de saison » habituellement requis.
En 1924, à la suite d’un suicide évité de justesse, il est amené au temple zen Sōtō Hōon-ji, dont le prêtre l’accueille dans la fraternité zen. La vie zen semble fonctionner pour Santōka : dès l’année suivante, à l’âge de 42 ans, il est ordonné dans la secte Sōtō.
A partir de 1926, il alterne de longs voyages à pied et de brefs passages à Kumamoto, où il a installé sa famille, et pendant lesquels il publie des haïku et commence à rédiger une revue de son cru intitulée Sambaku. Puis il reprend la route. Pour survivre, revêtu de sa robe de prêtre et d’un grand chapeau en lanières de bambou appelé kasa, équipé d’un unique bol qu’il utilise à la fois pour demander l’aumône et pour manger, il va de maison en maison pour mendier.
En 1932, Santōka s’installe pour un temps dans une masure de la préfecture de Yamaguchi, qu’il nomme « Gochūan » (l’ermitage « Au beau milieu »). Il y vit des contributions de ses amis et admirateurs, de l’argent envoyé par son fils et de ce qu’il pouvait faire pousser dans son jardin.
À partir de 1934, alterneront encore voyages à pied, souvent interrompus par la maladie ou la dépression, et séjours au Gochūan. Le 11 octobre 1940, Santōka, à cinquante-sept ans, meurt dans son sommeil.