Depuis quelques décennies, la fratrie est envisagée comme un espace relationnel, qui ne se résume pas à un lien de dépendance aux figures parentales.
La vision du fraternel dans son rapport aux parents est aujourd'hui complétée par une conception narcissique, qui nous fait passer d' un axe vertical parent-enfant, à la spécificité d'un axe horizontal. Freud, en dépit du mythe nodal œdipien centré sur l’histoire d’un enfant unique, a souligné qu'à partir du deuxième enfant, le complexe œdipien devient un complexe familial. Le fraternel est un déclencheur d'éléments essentiels d’envie, de culpabilité et d'identification ; il prépare ainsi le processus d'œdipification. Lacan évoque une double issue du complexe fraternel : soit le sujet reste dans une position d’alliance
narcissique avec la mère, repoussant dans la destructivité tout autre vécu comme un intrus, soit il reconnaît l’autre avec lequel va s’engager une lutte rivale impliquant un rapport à l’objet.
Il trouve alors à la fois autrui et l’objet socialisé. Le lien fraternel, modèle de l’amitié ou du lien de couple, recouvre une position initiale à élaborer, fondée sur la haine pré-ambivalentielle. Le frère haï n'est alors pas seulement un rival envié, il incarne les désirs incestueux que le sujet ne peut reconnaître, mais qu’il identifie chez cet autre soi-même qu’est le frère. Le frère est une surface d'inscription projective, un miroir qui renvoie le caractère insupportable de ses propres désirs ; il représente un alter ego mais également un double, comme le souligne le lien gémellaire. Ce numéro de la revue Dialogue concerne les variations du lien fraternel comme les diverses scènes du soin psychique où se rejouent transférentiellement les scènes fraternelles.
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