L’Homme aux rats nous offre une première vue, toujours pertinente, sur l’argent. Il est la merde à la place des yeux d’Anna Freud, ce que Freud interprète comme le vœu d’épouser sa fille non pour ses beaux yeux, mais pour de l’argent. Quant aux rats (Raten), grâce à leur homonymie avec l’acompte (Ratten), ils permettent à cet analysant d’espérer solder, avec une monnaie-rat, sa dette à l’endroit du père. Deux faces donc : le vœu incestueux du sexe avec Anna, mais amendé par une conjuration de cette transgression, dès lors que son motif n’est pas la libido mais la soif d’argent.
Chez Lacan, le mathème du discours capitaliste donne à lire une promesse qui retentit comme la phrase sinistre :
« Enrichissez-vous ! » Telle est sans doute la supériorité du capitalisme.
On ne trouve ni dans le féodalisme ni dans l’esclavagisme une phrase du genre : « Tous nobles ! Tous maîtres ! » À partir de ces prémisses, plus rien n’interdit de peser l’argent, y compris dans la pratique analytique, à l’aune de sa valeur : usage ou échange. Ni non plus, puisque manifestement l’argent concurrence le sexe dans une conception cynique de l’« éthique », de se demander si, à jamais, les
centi-milliardaires vont écumer nos vies.
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